Il y a des groupes comme ça, où l’on achète par habitude, parce qu’on sait qu’ils proposent toujours quelque chose d’assez bon pour ne pas décevoir. Et parfois, vous tombez même sur une album détonnant qui sort de l’ordinaire et recevez une énorme claque que vous n’aviez pas vu arriver. C’est le cas de The Mirraz qui se lâche avec son nouvel album S’il vous plait!!! (prononcez Shirubupure en japonais) paru le 10 février 2016, partant expérimenter notamment le terrain dance/électro.
En décembre dernier, The Mirraz proposait aux alentours de Noël et pour une durée limitée, son album en téléchargement. Reprenant le concert innovant de Radiohead, il était possible de le télécharger gratuitement dans sa plus simple forme ou de donner différentes sommes. Pour ceux qui souhaitaient soutenir le groupe financièrement, quelques titres bonus étaient même proposés. Cet album, est le premier album complet produit par le label indépendant du groupe, Death Pyramid Record, branche du label Speedstar. Et comme The Mirraz est LE groupe de la scène rock indé maître du concept « produit dérivé », qu’il n’hésite pas à décliner à n’importe quelle occasion, ne nous arrêtons pas simplement sur l’album, mais parlons de sa sortie limitée ultra complète.
– Design, marketing et goodies : du rêve en boîte
Ce n’est pas la première fois que le groupe propose un nouvel album en édition limitée sous forme de boîte. Les fans qui suivent le groupe depuis quelques années, ont déjà pu se délecter du packaging de Erabarete Koko ni Kitan janaku, Erande Koko ni Kitanda en 2013 et de Iitai Koto wa Nakunatta une année auparavant. La boîte dans laquelle est livrée l’album et sa part de goodies est très similaire aux précédentes. A l’extérieur, on y voit les bandelettes de la momie mascotte, cette fois-ci soutenues de rouge. L’intérieur n’est pas en reste, et met en scène Kinoi-kun volant dans son petit vaisseau, dans un décor reprenant le design de l’album. Cette boîte, loin d’être comparable à celle de Pandore, renferme son lot de surprises, tout comme les box précédentes : stickers, badges, livre illustré racontant les aventures du personnage momifié, l’album bien évidemment… Mais cette fois-ci, la cerise sur le gâteau, c’est une montre à l’effigie la Kinoi-Kun. Même pour ceux qui en ont l’habitude, le groupe continue de surprendre avec son merchandising. Enfin une stratégie bien utilisée, qui sait comment faire dépenser ses fans sans les frustrer. Car même en concert, le stand goodies de The Mirraz est parfois plus intéressant que le live lui-même. Les produits proposés sont toujours de qualité et à prix raisonnable. Ce coffret, coûtant dans les 5000 yens, vaut largement son pesant d’or. Un produit fini, bien pensé et qui en plus, nous y venons, propose un contenu musical au dessus de toutes attentes.
– Boite de pandore musicale : une délicieuse explosion
Jusqu’ici, The Mirraz a souvent proposé des chansons un peu redondantes. Catchy, mais peu différenciables les unes des autres. Il faut dire que les titres à rallonge sont difficiles à mémoriser et ce, malgré des refrains répétitifs au possible. Les textes, fais de mots repris et redits, sont d’ailleurs la marque de fabrique du groupe. Shohei Hatakeyama déverse ses paroles sans s’arrêter, de manière presque monocorde et linéaire. Le rythme est créé par ces mots qu’il enchaîne et répète de nombreuses fois, et c’est bien là, la seule trace de mélodie vocale que l’on trouve dans les chansons. Car il faut le dire, on est loin d’avoir un rossignol au micro. Son flow soutenu par un rock tranchant, donne un résultat se rapprochant du punk. Cette impression s’accentue avec des morceaux souvent courts et expéditifs. Et pourtant, bien que ce mouvement soit anarchique, The Mirraz ne rentre pas tout à fait non plus dans cette case.
Si tous ces points ne sont pas oubliés sur ce nouvel opus, il y a quelque chose d’autre, rarement entendu sur les précédents albums. Différents accompagnements électro apparaissent sur l’ensemble des nouvelles compositions. La direction prise sur Pandora no Hako, Tsunderessune, dont la vidéo est apparue sur le web fin 2015, est explorée en profondeur. Le premier titre ouvre avec un son assez industriel, de l’électro lourde et agressive. Le beat est très répétitif, collant parfaitement avec le débit uniforme et ultra-rapide du chanteur. Le rendement est parfois criard, comme une boîte à musique en 8-bit déraillé, ou un vieux clavecin, mais dans ce chaos tumultueux, le résultat reste harmonieux. Une spirale infernale euphorique, ça part joyeusement dans tous les sens, mais comme coincé dans un une boucle redondante, un time loop un peu fou. The Mirraz n’arrête cependant pas son expérimentation en si bon chemin. On y retrouve des mix dignes de clubs à la mode (Doyou no Harajuku maji de kuso), tout en évitant de suivre la tendance actuelle qui mange du dubstep à toutes les sauces. Pas de raison d’avoir peur donc, car le résultat est parfaitement balancé. Parfois l’électro se fait plus douce (Itsudemo shineru), comme ce que l’on peut entendre aussi chez des groupes tels que 80KIDZ ou Glen Check. Mais on s’aventure aussi vers de l’électro plus abrupte, entendu dans des les milieux plus dark, new wave et undustrial. On pourrait presque croire que Shohei a fait ses classes chez Hora de Schwarz Stein. L’utilisation d’EDM offre vraiment une nouvelle dimension aux morceaux de The Mirraz, enlevant peut-être une petite couche au côté garage, mais donnant beaucoup plus de profondeur en retour. Les titres restent vraiment détonants, et les différentes sonorités sont bien choisies pour chacun des morceaux. De E? Sore wa are desu ka ? à Motherfucker!!! en passant par Naa? Naa? Naa?, difficile de décider, quel titre est le plus percutant tellement ils sont explosifs. Certaines chansons sont plus popish comme Tsuka Tsuka ou bien Soushiki o shiyou. On s’évade même vers une ballade avec Earworn Love ! Mais l’album reste toujours cohérent, rien de dépareillé. En plus des douze titres de l’album, on peut écouter six remix, qui diffèrent suffisamment de leurs originaux pour être également intéressants, en offrant des arrangements allant du kitsch à la house ou encore la transe.
Le clip de Pandora no Hako, Tsunderessune
– Quand c’est fini, y en a encore
Parce que The Mirraz ne fait pas les choses à moitié, son édition limitée, en plus des goodies, s’accompagne d’un DVD live. Celui-ci a été filmé au WWW le 27 avril 2015, lors de la tournée PYRAMID de 427part8 -BATMON-. Le menu du DVD reprend d’ailleurs l’image de promotion mettant en scène le groupe en costume de Batman et Robin. Le DVD présente l’ensemble du concert, avec une durée approximative d’1h30. Le chanteur a sa dégaine habituelle : casquette estampillée MRZ vissée sur la tête et lunettes noires en dessous. La qualité des images varie, parfois moyenne voire médiocre, mais généralement satisfaisante. Les close-up sont même plutôt nets, même si l’on remarque régulièrement du bruit sur la vidéo.
Si le groupe joue des compo qui bougent bien, les membres ont tendance à être à l’opposé de leur musique sur scène. Si on vous dit que le batteur est celui qui s’agite le plus, alors qu’il est assis sur un tabouret, cela vous donne une idée claire de la situation. Heureusement les montages sont bien faits, et le concert reste agréable à regarder. Pour sa défense, il faut dire que le talent de Shohei réside dans le fait de chanter des textes de trois pages en deux minutes chrono, sans vraiment s’arrêter pour respirer. Sa bouche se doit de rester coller au micro au risque de perdre des bouts de texte en route. De fait, on peut excuser sa performance particulièrement statique. Pour les autres, il n’y a pas de réelle explication, mais même pendant les interludes, ils restent très sages. Les titres s’enchaînent sans pause, si ce n’est un MC vers le milieu du concert, entre le bassiste et le chanteur. Le guitariste ne semble pas parler souvent, on ne l’entend que sur les chœurs. Un dernier MC interrompt le show vers la fin du set, avant le rappel. La setlist est bien ficelée. Quelques titres du nouvel album en font partie. Les hits qui sont taillés pour la scène, ou plutôt pour la fosse, ne sont pas oubliés : Sushi a gogo, Top of the Fuck’n World, Check it out ! Check it out ! Check it out ! Check it out ! (Oui… une fois ne suffit pas, le groupe semble recevoir ses royalties en proportions du nombre de lettres par titre) Bref de quoi rendre le public du WWW fou et déchaîné.
Filmé en une prise, le clip vidéo de Tsuka Tsuka représente bien la folie du morceau
S’il vous plait!!! est sans aucun doute l’une des meilleures productions du groupe depuis ses débuts. Son côté innovant projette cette galette en haut de la liste. The Mirraz a su se détacher de ses inspirations rock classiques pour passer à l’offensive et rendre son style encore plus unique, surprenant là où l’on s’y attendait le moins. Les nouveaux titres sont définitivement taillés pour le live, et il ne reste plus qu’à espérer que les membres se lâchent aussi un peu plus sur scène. Pour ceux qui sont tentés par cet opus, il est évident qu’il ne faut pas hésiter à investir dans ce coffret complet. Pour ceux dont la bourse reste plus restreinte, l’album lui-même ne décevra pas non plus.
Tracklist de S’il vous plait!!! :
01 マジか。そう来たか、やっぱそう来ますよね。はいはい、ですよね、知ってます。(Maji ka? Sou kita ka, yappa sou kimasu you ne. Hai hai, desu yo ne. Shittemasu.)
02 まざーふぁっかー!!! (Motherfucker!!!)
03 え?それはアレですか?(E? Sore wa are desu ka?)
04 イヤーワームラブソング (Earworm Love Song)
05 パンドラの箱、ツンデレっすね (Pandora no Hako, Tsunderessune)
06 つーか、っつーか (Tsuka, Ttsuka)
07 いきなり告白とかしないほうがいいと思う (Ikinari kokuhaku tokashinai kata ga ii to omou)
08 葬式をしよう (Soushiki o shiyou)
09 なぁ?なぁ?なぁ?(Naa? Naa? Naa?)
10 土曜日の原宿マジでクソ (Doyou no Harajuku maji de kuso)
11 いつでも死ねる (Itsudemo shineru)
12 もしも過去に行けたなら (Moshimo kako ni iketa nara)
13 MA・ZI・CA!(IKINARI Remix)
14 TUuuuuuuKA!(DOOPE Remix)
15 PA・N・DO・LA!(SUPER Remix)
16 SO・U・SHI・KI!(BLACK Remix)
17 SHI・NE・LU!(HOUSE Remix)
18 MO・SHI・CA・CO!(MAIAMI Remix)